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Mathieu Laca, Rose Sélavy (Portrait de Marcel Duchamp), huile sur lin / oil on linen, 46cmX38cm, 2012 |
(Enflish follows)
J’ai toujours eu une
admiration inconditionnelle pour les danseurs; surtout les danseurs classiques.
Quand j’étais enfant, mon plus grand rêve était de devenir danseur; je me
voyais en Barychnikov ou, pour être bien sincère, plutôt en Margot Fonteyn. Les
costumes sont tellement plus grandiooooses!! Je me voyais en chaussons à
pointes emporté frénétiquement en dizaines de piqués légers de jardin à cour,
pendant que la foule en délire hurle des bravos, éblouie par une pétarade de
minuscules éclairs projetés par les millions de paillettes qui tombent en
cascade sur les flancs légers de mon tutu rose. Ça, c’est mon petit côté Drag
Queen! Au fait, vous pouvez le deviner, j’ai adoré le film Black Swan!
Maaaagnifique! Et, tant qu’à y être, puisque je dois crever un jour ou l’autre,
je demande au Ciel de m’accorder la grâce de mourir les tripes transpercées
d’un éclat de miroir souillé de MakeUp, en hurlant à fendre l’âme pendant que
des milliers de petites plumes volent partout, soufflées par trois gros
ventilateurs en coulisses, et qu’elles vont griller aux cintres de la scène sur
les réflecteurs fumants. Je vois la scène d’ici. Maaaagnifique. Surtout que je
n’ai pas l’intention de crever avant l’âge de 96! Fêter mes 96 ans sur des
chaussons à pointes et en tutu rose! Si la Providence m’accorde cette faveur,
je me considèrerai quitte pour l’enfance merdique que j’ai eu à endurer à
tenter de m’insérer quelque part dans les équipes de hockey qui me rappelaient
à grandes taloches derrière la tête et à coups de pieds au cul que les fifs
n’ont pas d’affaire dans les jeux de gars.
Je vous demande
pardon! Il m’arrive, comme ça, que je me laisse emporter! Pour en revenir à mon
admiration inconditionnelle pour les danseurs classiques, je voudrais souligner
le fait que l’on n’apprécie pas la valeur d’un danseur à ses performances sur
scène mais à la quantité de sang dans ses chaussons. Et croyez-moi, cela vaut
tout autant pour l’art visuel.
Savoir comment
construire un bon faux-cadre, comment choisir la bonne toile de lin et la
tendre selon les règles de l’art, savoir bien appliquer le bon gesso… Savoir
travailler le gesso traditionnel, celui qui pue et qui craque. Savoir préparer
et appliquer la nauséabonde colle de peau qui ressemble plus ou moins à de la
vomissure de lendemain de veille. Savoir comment s’y prendre pour polir la
surface sans suffoquer. Savoir fabriquer sa propre peinture en broyant les
pigments avec cette grosse mollette de six pouces qui tourne inlassablement en
faisant d’érotiques bruits de succion; se faire des tendinites jusqu’au jour où
on finira par pouvoir se payer quelque tubes de peinture Michael Harding… ou
jusqu’au jour où l’on tombe d’inanition parce que, voulant finir de broyer son
tube, on a oublié de manger. Savoir travailler l’encaustique sans se brûler au
troisième degré. Savoir peindre à la tempera sans devenir aveugle… ou carrément
fou. Savoir appliquer le lapis lazuli et l’orpiment sans s’empoisonner. Savoir…
Savoir… Savoir… apprendre… ne jamais cesser d’apprendre… toujours se poser des
questions… chercher les réponses sans se décourager.. ne jamais accepter le
moindre compromis. Ça, c’est le sang dans les chaussons du peintre!
Comme on est loin
d’aller s’acheter trois ou quatre tubes chez Omer, un beau petit canevas déjà
stretché tout prêt puis un petit pinceau en éventail, et de s’installer dans la
joie et l’allégresse pour peindre un beau petit bouquet de fleurs dans un
gentil petit pot en forme de lapin neurasthénique!
Blood in
the Ballet Pumps
I have
always admired dancers; especially classical dancers. When I was a kid,
becoming a great dancer was my biggest dream; I could see myself as Barychnikov
or, to be really frank, as Margot Fonteyn since the costumes were so much more
faaabulous, wearing blocked shoes and tiptoeing through the stage while
spectators were cheering, blinded by the reflection of thousands of spotlights
on the countless sequins sewed on my marvelous pink tutu. That’s my flaming
queen side. By the way, I just loved Black Swan! So faaabulous! And, since I
have to die one day or another, I hope that the Almighty with let me die with a
piece of broken makeup stained mirror stuck in my belly, screaming and loosing
white feathers all over the place. I can imagine the scene; especially since I
expect to die being at least 96! So faaabulous! At least that would make up for
the shitty youth I had trying to fit somehow in the local hockey team!
Forgive me!
I sometimes get carried away like that! Coming back to my admiration for
ballet, I would like to stress the fact that the best way to appreciate a
dancer is not through her performance on stage but through the amount of blood
in her pumps. And I believe that it goes for visual art as well.
Knowing how
to build the right stretcher, how to choose and stretch the appropriate canvas,
to apply the right amount of gesso, the right kind of gesso… Knowing how to
work with traditional gesso. Knowing how to prepare and apply that stinking
rabbit skin glue. Knowing how to polish the surface. Knowing how to make your
own paint with that huge 6” diameter glass muller until you can afford these
Michael Harding’s tubes or until you faint from exhaustion. Knowing how to
handle encaustic paint. Knowing how to apply tempera. Knowing… knowing…
knowing… learning… never stopping to learn… always asking questions… always
looking for answers… never accepting not even the least compromise, that’s the
blood in the painter’s pumps!
How far are
we from getting a couple of cheap tubes at the local art store and painting a
nice look-alike bunch of flowers in a shiny gold pot.
That too
makes the real artist!
Comeau
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